COPPELIA, UNE FIANCEE AUX YEUX D'EMAIL...
Habiller notre Coppélia de Cuir. Regarder Coppélia avec des
yeux de grand enfant où cette poupée serait « maîtresse » du jeu, « maîtresse » du cœur de ses soupirants.
En m’inspirant du traité sur le théâtre de marionnettes de Henrich Von Kleist, j’aimerais vous
faire croire qu’un pantin mécanique pourrait contenir plus de charme que la charpente du corps humain.
Pour l’amour de Frantz, Swanilda prend la place de Coppélia la poupée. Il en va ainsi dans le
livret*…. Et si Coppélia n’avait pas été remplacée? Utiliser ce livret si amusant, profiter que l’œuvre est inachevée pour réécrire celle-ci, me servir aussi de cette musique composée par Léo
Delibes, la valse mais aussi et surtout cette mazurka si enivrante.
Redessiner Coppélia… utiliser une gomme et quelques crayons de couleurs, enlever ou bien
rajouter ça et là quelques fantaisies… beaucoup de rouge mais aussi du noir, aussi noir que ces "brillantes, brillantes bottes de cuir" portées par Séverine dans la « Venus in fur » d’Andy Warhol.
Tout aussi joli, le costume sera noirci. La pointe du chausson sera remplacée par l’aiguille du talon, le nœud dans les cheveux, symbole de l'amour, par le fouet.
Utiliser certains ingrédients qui ont constitué ce ballet romantique par excellence. Utiliser
la pantomime au service du sens d’une situation que trop de narration censurerait. Tout cela peut-être pour mieux encore rendre lisible le sujet et en révéler le
sens.
Mettre en valeur cet immense amour pour Coppélia au point de remplacer ses prétendants par de
jeunes hommes esclaves de leurs propres sentiments. Coppélia fascine, ce n’est qu’une poupée, rien de vivant et pourtant…
Notre Coppélia s’est créée avec la complicité des danseurs et tout particulièrement Alexandra
Besnier et Min-Jeong Kim qui habitent « une Coppélia réinventée ». Elles sont mes complices. En exerçant sur scène ce fascinant et envoûtant pouvoir de séduction, elles me font me rappeler sans cesse
que Coppélius, certes invisible dans notre version, est toujours là.
Coppélius ne serait-il peut-être pas d’ailleurs l’évocation de toutes ces sombres raisons à
l’origine de nos quêtes d’amour et de beauté qui pèsent inconsciemment sur nos goûts, nos choix. Pour moi, Frantz n’est pas amoureux de Coppélia mais de tout ce à quoi il aspire, d'un idéal féminin
qui n'existe évidemment pas. Peut-être lui ressemblons nous tous? Comme le dit Paul Valéry, "il n’existe pas d’être capable d’aimer un autre être tel qu’il est. On demande toujours des modifications.
Car on n’aime jamais qu’un fantôme, ce qui est réel ne peut être désiré".
Enfin, je choisis la scène comme étant l’évocation de la chambre de Coppélia. Le public sera
donc au bas de la Maison de Coppélius et apercevra Coppélia un peu comme Frantz l’aperçut sur son balcon en 1870.
Quelles chances inouïes d'avoir rencontré Mesdames Wilfride Piollet et Monique Loudières,
danseuses étoiles de l'Opéra de Paris, lors de tête à tête qui ont su me conforter dans mes choix et m’éclairer en m'apprenant qu'évidemment Coppélia était, elle aussi, un amour inaccessible et
impossible et donc une Dame Blanche.
Hervé Koubi - Extraits du carnet de notes de la création
* Coppélia, ou la Fille aux yeux d'émail est un ballet en deux actes et trois tableaux
d'Arthur Saint-Léon, sur un livret de Charles Nuitter, musique de Léo Delibes, d'après le conte d'Hoffmann L'Homme au sable, représenté pour la première fois à l'Opéra de Paris le 25 mai 1870.
COPPELIA, A FIANCEE WITH ENAMELED EYES
To dress "our" Coppélia with leather. Look at Coppélia with the eyes of a child, when this puppet becomes ‘mistress’ of the game, ‘mistress’ of the heart of her
suitors.
Being inspired by Henrich Von Kleist when he says "I would like to make you believe that a mechanical puppet could contain more charm than the frame of the
human body".
For the Love of Frantz, Swanilda takes the place of Coppélia, the puppet. At least that’s how it goes in the booklet…
What if Coppélia hadn't been replaced?
Using this amusing book, taking advantage of the fact that it's an unfinished work, to rewrite it. Play also with the music composed by Léo Délibes, the waltz but also (and most especially) the
exhilarating mazurka.
Redraw Coppélia…using an eraser and some colour crayons, take off or add here and there some fantasies…a lot of red but also some black, as black as those ‘shiny, shiny boots of leather’ worn by
Séverine in ‘Venus in furs’ by ‘The Velvet Underground’. Equally as pretty, the costume will be blackened. The ‘pointe’ will be replaced by the stiletto heel, the knot in the hair by the whip.
Using certain ingredients which have been the base of ballet ‘par excellence’. Using the pantomime to serve to create sense of situation that too much narrative might censor. Perhaps all of this may
render the subject more comprehensible and reveals it’s meaning.
Highlighting this immense love for Coppélia to the point of replacing her admirers by young males, slaves to their own feelings. Coppélia fascinates, but it is only a puppet, not alive but yet…
Our Coppélia was created with the help of the dancers and especially Alexandra Besnier and Min-Jeong Kim who reside in a ‘reinvented Coppélia’. More than just working on character interpretation,
they are my accomplices in exercing this fascinating and bewitching power of seduction. They ceselessly remind me that Coppélia, although invisible, is always there.
Perhaps Coppélius is also the evocation of all those dark reasons originating from our quest for love and beauty, which weigh unconsciously on our tastes, our choices. For me Frantz is not in love
with Coppélia but with all that he aspires to. Maybe he resembles all of us?
“There exists no being capable of loving another such as he is. We always ask for modifications. This is because we never love just a phantom; that which is real cannot be desired”
Paul Valéry
Lastly, I chose the scene as to evoke the bedroom of Coppélia. Therefore the public will be lower down in the house of Coppélius and will perceive Coppélia similar to how Frantz observed her from his
balcony in 1870.
I would like to particularly thank the dancers Wilfride Piollet and Monique Loudières for our discussions which helped to enlighten me.
Hervé Koubi – Extacts from his notebook
L'EQUIPE ARTISTIQUE / THE ARTISTIC TEAM
Chorégraphie / Choreography : Hervé KOUBI
Assistant chorégraphique / Choreographic assistant : Guillaume GABRIEL
Interprétation : Alexandra BESNIER / Guillaume GABRIEL / David GUASGUA / Min-Jeong KIM / Carl PORTAL / Carlos FERREIRA DA SILVA
Musicique / Music : Léo DELIBES et Kronos Quatett
Costumes / Costums : Guillaume GABRIEL
Création lumière / Light design : Lionel BUZONIE